4 Commentaires

Oui, je sais, on a déjà fait un tour des livres sur le renard, mais je ne pouvais quand même pas passer sous silence la bande dessinée La renarde, paru récemment chez Professeur Cyclope.

la-renarde-marine-blandin-sc3a9bastien-chrisostome-casterman-couverture

On connaît Marine Blandin pour le singulier Fables nautiques, elle signe ici en collaboration avec Sébastien Chrisostome un album de strips qui met en vedette la renarde: un être tout en rondeurs et en perfidie.

La cruelle passe son temps à trouver des ruses pour manger les petits de la lapine, on se demande même comment cette dernière trouve le courage d’en avoir d’autres tant ils sont destinés à finir avalés tout ronds.

001

(source: telerama.fr)

On y croise aussi un cheval, qui se croit le roi de la rime et de l’audace, mais qui est surtout victime de sa gourmandise, les puces Bud et Terence qui ont le malheur de vivre sur un vieux loup galeux, le chasseur et son chien stupide.

La renarde les berne tous dans la bonne humeur. Le tout reste léger, mais bien efficace.

 

À découvrir aussi, le Grand méchant renard qui est quand même moins méchant que… maternel ?

235131_c

3 Commentaires


Après plusieurs lectures, des vacances dans le bois et quelques piqûres de moustiques, j'ai repris la très belle pièce de théâtre de Marie-Ève Huot, Noeuds papillon, et je me suis dit que je me devais de la partager avec vous.

Une pièce de théâtre? Eh oui. Quelqu'un m'a déjà dit qu'une pièce vu sur scène avec les comédiens et tous les moyens qu'une production demande, c'est bien, mais qu'un texte de théâtre existe en soi, et qu'il est souvent porteur d'une grande puissance. Je crois bien que c'est le cas de Noeuds papillon.

Et puis soyons honnêtes, quand lisons-nous du théâtre? Et du théâtre pour enfants de surcroît? Et qui aborde un thème aussi délicat que le deuil et la mort?

Lorsqu'il est question de parler de la mort avec un enfant, notre cerveau se met souvent en mode hyperactif. Quoi dire et comment le dire?

Certaines oeuvres artistiques savent trouver les mots justes et vrais, alors pourquoi ne pas leur demander un petit coup de pouce.

Commençons par le commencement, Marie-Ève Huot est une jeune comédienne, auteure et metteure en scène qui dirige le Théâtre Ébouriffé, cofondé en 2007. La pièce Noeuds papillon a été présentée à la Maison Théâtre
en novembre 2014.

Noeuds papillon raconte avec beaucoup de délicatesse et sensibilité l'histoire d'Amélie, 11 ans. À l'annonce du décès de son père, la petite arrête de parler. Tous essaient de comprendre ce qui se passe dans sa tête, Amélie la première. Avec l'aide d'Amelia Earhart, la première aviatrice à avoir traversé l'océan atlantique en 1928, elle apprendra à calmer les papillons qui s'emballent un peu trop dans son estomac. Tout au long de notre lecture, on sent que la plume de la dramaturge essaie de comprendre avec beaucoup d'empathie et d'humanité la réalité de l'enfant sans dramatiser plus que nécessaire. Bien que la pièce aborde un sujet grave, jamais Amélie est présentée comme une victime, bien au contraire. Au final, le texte se dépose en nous comme un souffle de vie simple et prometteur.

Extrait:

"Depuis que papa est mort, les choses se sont compliquées. Sans pouvoir vous expliquer exactement pourquoi, j'ai arrêté de parler.
Plus un mot.
Plus un son.
Le silence total.

Les médecins disent à ma mère que je vis un choc nerveux. Ils disent que l'accident de papa m'a traumatisée, qu'il faut me protéger. Je dois "ré-apprivoiser mon environnement" qu'ils disent, les médecins. Moi, j'ai plutôt l'impression que mon coeur s'est emballé.

Mon coeur-moteur roule à plein régime parce que quelque chose le pousse à fond: des milliers de papillons volent à l'intérieur de moi. Leurs ailes battent tellement vite qu'elles finissent par s'entremêler et ça fait comme un gros noeud dans mon estomac. Un gros noeud de papillons. Après, le vertige me prend, mon souffle se coupe, et tout tourne autour de moi."

Noeuds papillons est édité chez Lansman Editeur.

Pour voir un extrait de la pièce, cliquez ici.

Pour connaître les dates des prochaines représentations, cliquez ici.

Comme complément, je vous propose quelques albums coup de coeur.

Jojo la mache, Olivier Douzou, Editions du Rouergue.


Mon petit chien Gruyère, Yves Nadon et Céline Malépart, Les 400 coups.


Vieux Thomas et la petite fée, Dominique Demers, Dominique et cie.


La caresse du papillon, Christian Voltz, du Rouergue.


Ma maman est en Amérique, elle a rencontré Buffalo Bill, Jean Regnaud et Emile Bravo, Gallimard.

1 Commentaires

Certains livres posent des questions embêtantes, je ne vous apprends rien. Ils ont le pouvoir extraordinaire de modifier notre perspective sur la vie. Des médecins en prescrivent même pour soigner des troubles de santé mentale.

Je vous en présente deux ici qui s’interrogent sur notre rapport au travail. Comment notre métier/nos actions peuvent avoir un impact positif sur notre entourage et au final, nous aider à trouver une certaine sérénité. (Non je ne parlerai pas d’ouvrages de psychologie populaire, promis). Le livre d’images Et moi que pourrais-je faire? de José Campanari propose une ouverture vers l’autre qui devient salutaire et la bande dessinée Tueur de moustiques de John Porcellino illustre le cheminement d’une réflexion qui poussera le narrateur à abandonner son emploi. (eh oui, je vous dévoile déjà le dénouement)

Et moi que pourrais-je faire?

Si à l’instar de M. Untel, il vous est déjà arrivé de vous lever marabout et d’empirer votre état en lisant le journal. S’il vous vous êtes senti démuni face à toutes ces mauvaises nouvelles qui tournent dans votre tête : ce livre est pour vous ! Véritable antidote à l’impuissance, le texte tout en nuances est magnifiquement illustré par un collage de matériel recyclé. Une superbe récupération de la parole de médias (journaux) pour constituer la sienne.

 

Tueur de moustiques

Je ne connaissais pas cet emploi et à première vue il me semblait plutôt inoffensif. Mais quand on apprend qu’il consiste à larguer du BTI (larvicide microbien) dans les lieux de reproduction de moustiques, c’est moins rigolo. Le journal en bande dessinée permet d’approfondir la réflexion du narrateur qui passe de la fierté adolescente de détruire et de vivre à l’extérieur comme un explorateur, à celle de contemplatif. “ Et puis, je pense que quiconque passe autant de temps dans la nature y gagne forcément une capacité à s’émerveiller et à respecter la vie et le monde naturel… » (p.87 : 1)

La violence et la jeunesse sont exprimées par une maladresse du trait au début. Ce dernier s’affine tout en rondeur, illustrant une certaine harmonie avec nature. Cette économie de moyens est présente dans la page couverture où le personnage est montré avec les trois traits soulignant la stupéfaction (prise de conscience) devant l’insecte.

Ce livre est aussi l’occasion de découvrir le travail de diariste de John Porcellino qui raconte ses histoires dans le fanzine « King-Cat » (http://www.king-cat.net/) depuis plus de 25 ans. Le thème rassemble des récits écrits entre 1989 à 1999.

tueur de moustiques

2 Commentaires

Un des plaisirs du voyage est le raconter. Mon ami et auteur Jacques Boulerice vient de publier avec son amoureuse-photographe, Madeleine Ghys, un chouette livre Un autre jour: récits de voyage sur les bancs publics. Le projet est lumineux, pendant un an le couple a fait parvenir des cartes postales à des amis, évoquant des bancs publics au gré des espaces et du temps qui passe. Comme plusieurs textes s’apparentent au jeu, il est tout à fait approprié d’en parler ici.

“Lundi 9 juillet

Quand l’étape s’allonge, à force de fixer l’horizon, nous n’arrivons plus à distinguer la vraie nature des formes dessinées sur la ligne. La famille se divise alors en deux équipes: les promontagnes et les pronuages. Parfois, un petit comique plaide pour de la barbe à papa, de la bourre ou des peluche. N’importe quoi ! Une fois la preuve établie qu’il s'agit bien d’une montagne, le premier qui la voit bouger gagne une autre journée mémorable. Au soir, le sommeil s’étend avec nous comme sur un nuage.”

J’ai eu la chance d’en recevoir et le bonheur de répliquer.

IMG_1585_thumb3

Entendu au temple de Fushimi Inari (Kyoto):

-Ce qui est bien ici c’est que les renards ne bougent pas trop. On les a tellement vénérés qu’ils se sont pétrifiés.

-On pourrait essayer avec les corbeaux, ça nous ferait des vacances.

-Et qui nous avertirait le jour du ramassage des déchets ?

J’en profite par la même occasion pour pointer deux chouettes albums qui peuvent très bien être le point de départ d’un exercice d’écriture amusant:

Chers maman et papa : cartes postales du suricate

J’adore Emily Gravett pour son irrévérence et ses jeux de mise en abyme.

Mon album de cartes postales, texte de Titus et dessins par Oubrerie (si si, le même qui a illustré la série de bandes dessinées Aya de Yopougon)

Bon voyage!

2 Commentaires

Quand j’ai lu sur le blogue de l’auteur Dedieu qu’il s‘apprêtait à lancer une collection “Bon pour les bébés” (ça ne peut pas être plus clair), testée et approuvée dans les crèches françaises, je trépignais d’impatience de voir à quoi la bête ressemblerait.

Le principe est simple: des livres cartonnés à hauteur de lecteur (38 cm) qui présentent des textes choisis pour leur musicalité et portés par des illustrations contrastées. Le tout a une belle facture, un lustré qui illumine le noir et blanc. Oui, mais bon.

                IMG_3280

Voyons les titres: “Dans sa maison, un grand cerf”, on connaît la chanson. La couverture déjà me plaît, les yeux du cerf semblent accrocher le regard du lecteur. Le texte, “Un grand cerf/sa maison/par la fenêtre” empêtré de belle façon dans les bois, nous laisse des fragments de ver d’oreille dans la tête.

“Tas de riz, tas de rats”, ça pétarade déjà. Tout un défi de lecture, mais même si on trébuche un peu, l’effet comique du virelangue est là. Et les petits rats frémissent de gourmandise à travers les pages.

“Un roc/ pic un cap/ péninsule” clame-t-on sur la couverture de“La tirade du nez” tirée de Cyrano de Bergerac. Je crois que c’est le changement de ton qui fascine le plus (agressif, descriptif, gracieux, etc.) Il est amusant de voir les multiples transformations que subira le nez. Il sera même coupé en rondelles comme un saucisson, pauvre nez!

“Triangle/ de l’hypoténuse/ côté”, le théorème de Pythagore devient poème. Le triangle se transforme en chat, en cygne et en bateau à voiles, l’illustration évoquant le jeu chinois tangram.

Et qu’en pense le renardeau, c’est quand même pour lui au final que l’on fait tout cela. Il tente de saisir le cerf avec sa petite menotte, regarde attentivement la renarde lorsqu’elle parle de riz et de rats et bave joyeusement sur Pythagore. Je crois que le test est concluant.