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Avec les bilans du nouvel an, on est assailli de nombres qui ont plus ou moins de sens. Je me suis souvenue du projet de Bunpei Yorifuji dans L’échelle de l’esprit.

“Autrement dit, explorer notre ressenti vis-à vis des nombres et le ressenti des nombres eux-mêmes. Mesurer nos pensées et écouter la pensée des mesures.” p.4


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Dans ce documentaire illustré, la section qui explique comment fonctionnent nos évaluateurs mentaux est vraiment géniale. L’auteur examine plein de facteurs qui influencent la manière dont on se représente les nombres. Ce qui détermine par exemple notre perception d’une situation et certaines de nos actions: nos achats, nos comportements.

Et vous savez quoi? Une fois que notre opinion est formée, il est difficile (impossible)de penser autrement.


L’échelle de l’esprit explore aussi la forme des nombres: le système de notation positionnelle (ajouter un chiffre à chaque fois que l’on multiplie un nombre par dix) qui est bien pratique pour noter des nombre mais pas trop pour figurer combien ça fait. 

Il s’attarde à l’utilisation courant de diverses unités pour voir quelle utilisation on pourrait en faire dans l’expression des sentiments humains.

“Ainsi, l’auteur propose d’utiliser le « Minami » pour mesurer le sentiment partagé entre deux personnes qui sont plus qu’amies, mais pas encore amantes ; le « Thankyou » pour quantifier cette sensation de pouvoir compter sur un ami en cas de coup dur ; et le « Bateau-usine » serait quant à lui une façon de chiffrer le sentiment de surmenage au travail.” L’ÉCHELLE DE L’ESPRIT – Éditions B42 (editions-b42.com)


Enfin l’auteur propose une manière originale de comprendre les nombres en les figurant avec son corps pour les lire. Par exemple avec sa main, si on dit que la surface d’un doigt est une unité, alors la main ouverte couvre 10.

Il termine en souhaitant que les nombres éloignés de notre perception acquièrent le même super pouvoir que certains chiffres qui nous sont amis.


L’échelle de l’esprit de Bunpei Yorifuji n’est pas le premier ovni littéraire de cet auteur. Illustrateur et graphiste japonais, il réfléchit à la manière d’illustrer des concepts abstraits ou vulgariser des sujets plus ou moins tabous: le caca ou la mort.


Dans La vie merveilleuse des éléments, il a personnifié chaque élément du tableau périodique en associant des caractéristiques physiques humaines (barbu, chauve).


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D’autres livres pour mieux comprendre les nombres, des statistiques sur notre monde.


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Le dernier livre de François Blais m’enthousiasme par l’acuité de son regard sur l’amitié. Comment peut-il nous éclairer autant sur les intentions involontaires et les rapports de force qui régissent nos relations?

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L’auteur réussit à insinuer le fantastique (comme une peur sourde) dans un petit village près de Trois-Rivières, comme il l’avait auparavant dans “Les rivières ; suivi de Les montagnes : deux histoires de fantômes” et plus récemment dans “Lac Adélard” dans la collection Noire de la Coute échelle.

On y suit Adrienne et Léonie, 14 ans, qui enquêtent sur la disparition de leur jeune voisine Joey. Si le prétexte de l’enquête est d’abord secondaire pour Adrienne, elle y voit une possibilité de rapprochement avec son amie au détriment de Corinna la troisième du trio, Joey devient réellement en danger. Adrienne reçoit de mystérieux textos d’un ami qu’elle croyait imaginaire et qui devient de plus en plus menaçant.

L’acuité du regard de l’auteur, son humour sont particulièrement savoureux. certaines phrases en début de chapitres orientent ainsi la lecture:

“La fille invisible “Les adultes ont toujours moins de patience avec les enfants qui ne sont pas mignons.”” (p.213)


Le clin d’œil à la poésie de Perruche m’a particulièrement émue :

“- C’est un livre qui parle de perruches?

-Non. Quand je le lis, je trouve que c’est un livre qui parle de moi. Quand tu vas le lire, tu vas trouver toi aussi que ça parle de toi. En tout cas, J’espère.” 265


Une coquille s’est glissée dans le texte et m’a fait sourire: “La vérité était plus prosaïque: Corinna était une personne emphatique, elle s’intéressait réellement aux autres, et les gens sentaient ce genre de chose.” 221



Sinon dans un autre registre, Le transsibérien. Départ immédiat pour l’autre bout du monde est un documentaire formidable qui nous fait traverser sept fuseaux horaires à bord de ce train mythique dans un voyage près des habitants de cet immense territoire.

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Chaque arrêt est présenté dans une double page où l’on force l’observation par un défi “cherche et trouve”, un témoignage d’un habitant qui décrit son coup de cœur dans la ville, un descriptif historique, des infos sur la cuisine, la géographie, la température (l’hiver québécois n’a rien à envier aux hivers sibériens!)

Les illustrations rendent la lumière particulière d’un ciel de neige, de la pluie. On y sent quasiment le roulement des rails…


Pour continuer le voyage:

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J'ai été émue dernièrement par deux livres destinés aux ados qui abordent habilement le sujet de la perception, tout en touchant aussi ceux de la violence, de l'amitié, de l'intimidation, et du premier amour. (rien que ça !)


La bande dessinée chinoiseLa plus belle couleur du monde de Golo Zhao, met en vedette le personnage de Rucheng un jeune doué pour le dessin, qui a pourtant de la difficulté à rendre la lumière sur papier.

Une amie, Yun dont il ne se rend pas compte qu’il est amoureux, lui enseignera une technique pour mieux observer. Il entraînera son œil à voir la richesse des nuances. (technique que l’on peut nous même essayer!)

La bande dessinée d’une certaine ampleur (plus de 500 pages) nous porte dans une Chine des années 1990 avec un plaisir du détail dans le rendu des objets, des lieux et des personnages.

J’ai été éblouie par aspect vivant de l'éclairage dans ce livre et par les relations justes entre les jeunes.


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J’ai aussi lu avec grand plaisir le roman coréen Amande de Won-Pyung Sohn dont le personnage Yunjae est incapable de ressentir les émotions, particulièrement la peur,  parce que son amygdale cérébrale ne fonctionne pas bien.

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La voix de ce ce personnage est habilement rendue par une écriture qui adopte un point de vue détaché.

La traductrice mentionne d'ailleurs dans sa note à la fin du livre, que le ton est important: il fallait pour Yunjae une voix qui n’est pas fade. Il sait articuler correctement ses émotions limitées et ses observations. Étant un grand lecteur, il comprend mieux les émotions par les livres à travers lesquels il réussit à éprouver une certaine empathie.

“Mais les livres ne font pas de bruits. À cet instant-là, les histoires s’en échappent, calmement, fourmillant de détails, juste assez à la fois pour que je puisse les recevoir.“(167)


Enfin, malgré les deux contextes forts différents: la Corée actuelle et la Chine des années 1990, les deux personnages féminins principaux éprouvent des difficultés à réaliser leurs aspirations, artistiques pour Yun, athlétiques pour Dora.  Ce qui rend compte encore de grande iniquités entre les sexes.


Envie de poursuivre dans la même veine?  Le manga Blue period, aborde la théorie de l'art en racontant le processus d'admission aux Beaux-arts de manière absolument passionnante!

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Je ne suis pas une outarde, de Sébastien Gagnon, Édition Bayard Canada

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Un récit psychologique haletant qui met en vedette le cadavre noyé de Sierra, une adolescente dont on découvre le destin tragique dans les bois, au Lac St-Jean.

Un récit court, fragmenté, j’ai été été captivée par cette histoire raconté au "je" qui présente une jeune femme à la fois frondeuse et fragile et dont la langue inventive surprend les lecteurs à chaque page.


“Dur à croire, mais j’ai déjà été une petite fille naïve,

avant de connaître les difficultés hormonales et familiales.

Et avant d’être cette ado géniale et endurcie

que tu commences à découvrir,

je pensais que tout le monde, une fois passé l’asphalte, était fin.

Imbécile, mais fin.

Ce n’est pas le cas.


C’est donc pour des raison mûrement réfléchies

qu’on garde dans un état lamentable la trail qui mène à notre camp.

Le chemin est défoncé, caillouteux, branchu.

Tout sauf invitant.” (p. 21)

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Cette première neige est l’occasion de redécouvrir un magnifique album pour commencer à se mettre dans l’ambiance des Fêtes.

Soda mousse : un Noël pétillant, écrit par Mélanie Jannard, et illustré par Agathe Bray-Bourret, aux Éditions La Bagnole.


Ce livre nous plonge dans l’univers festif de Richard, un homme-enfant.

Nous sommes à la veille de Noël.  Son amie, Madame Petits-Plats, lui a interdit d'ouvrir son cadeau avant minuit. Il doit donc passer le temps et décide de sortir chercher du soda mousse à partager avec son ami bonhomme de neige.


Richard fête Noël seul, mais est entouré de tout un village où il se sent bien.

"Il ne pensait pas croiser sur son chemin autant de personnes qu'il aime bien!

Malgré la température hivernale, une chaleur s'installe confortablement à l'intérieur de lui." (p.31)


On vit avec Richard sa joie immédiate.

La musicalité des phrases, simples, rythme et transmet la frénésie de l'attente.

Richard doit patienter avant d'ouvrir son cadeau. Et quand le moment est finalement venu:


"Essoufflé, il se rappelle que la fête est loin d'être terminée.


-Mon cadeau! C'est sûrement l'heure de le déballer!


Il commence par enlever l'immense chou

pour se le mettre sur la tête. Son public est en délire !

Puis il déchire l'emballage frénétiquement.

Plus besoin de se retenir!"


J’ai été éblouie par les illustrations naïves et gracieuses, à la gouache et au feutre qui donnent vie à ce récit.

Les petits détails qui pullulent dans les pages font à la fois rire et émeuvent.

On trouvera dans les multiples références, une profondeur qui parlera aussi aux adultes.


Richard recevra de son amie le cadeau parfait: celui que je vous invite à découvrir par la lecture.

Soda Mousse: un Noël pétillantdeviendra sans aucun doute un incontournable des albums de Noël par sa singularité et le bonheur qu'il procure.


Psitt: l’autrice fera la lecture de son livre à la bibliothèque Hochelaga le vendredi 10 décembre à 18h. Pour plus d’information, appelez à la bibliothèque.